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Enquête démographique et de santé en Tunisie : des points positifs et des efforts à déployer

Les 30 et 31 janvier dernier, l’Office National de la Famille et de la Population (O.N.F.P.) a organisé à Tunis un séminaire pour présenter les résultats de l’Enquête Démographique et de Santé en Tunisie qu’il a réalisée auprès d’un échantillon représentatif au niveau national de 4184 femmes âgées de 15 à 49 ans qui ont été enquêtées entre juin et octobre 1988.
Cette enquête nationale a été exécutée avec l’assistance technique de l’Institute for Resource Development Macro-Systems (I.R.D.) et l’assistance financière de l’Agence des Etats-Unis pour le développement International (U.S.A.I.D.). Elle fait partie du projet mondial des Enquêtes Démographiques et de Santé (E.D.S.) qui a pour but la collecte des données sur la fécondité, la planification familiale et la santé maternelle et Infantile.
Il ressort de cette enquête que le mariage demeure en Tunisie le cadre principal où s’opère le processus de reproduction et que l’âge médian au mariage pour l’ensemble des femmes âgées de 25 à 49 ans est de 21,1 ans en 1988. Par ailleurs, l’enquête confirme les effets du milieu et du niveau d’instruction sur la fécondité; elle est plus élevée en milieu rural et parmi les femmes les moins instruites. La baisse de 25% qu’elle a enregistré durant les dix dernières années, passant d’une moyenne de 5,7 enfants par femme de 15 à 44 ans en 1978 à 4,3 en 1988, se trouve justifiée par certains facteurs dont, notamment, le comportement vis-à-vis de la nuptialité, le recul de l’âge au mariage et la pratique de la contraception, de plus en plus importante. De même, les Tunisiennes sont de moins en moins attachées à la famille nombreuse. En effet, le nombre moyen total d’enfants désirés est passé de 4,1% en 1978 à 3,5% en 1988.
L’E.D.S. révèle également que la connaissance de la contraception est quasi-générale (99%), en même temps qu’elle enregistre une évolution dans son utilisation chez les femmes mariées, passant de 31% en 1978 à 50% en 1988. En outre, la plupart des contraceptrices recourent aux méthodes modernes qui constituent l’axe central des activités de planning familial en Tunisie. A ce titre, le D.I.U. (dispositif intra-utérin) demeure la méthode la plus utilisée (17%), suivi par la stérilisation féminine (12%) et la pilule (9%).
La majorité des femmes (trois sur quatre) recourent aux services du secteur public pour l’acquisition de leur méthode contraceptive, alors qu’une femme sur quatre s’approvisionne auprès du secteur privé, pharmacies essentiellement. Le taux de mortalité infantile continue de baisser (50%o en 1983-88 contre 64%o en 1978-82), de même que celui de la mortalité juvénile qui est plus important (16%o contre 23%o pour la même période de référence). Bien que ces taux soient les plus bas d’Afrique du Nord, au moment de l’enquête, un enfant sur cinq mourait avant d’atteindre son cinquième anniversaire. C’est un taux qui est plus de cinq fois supérieur à celui des pays développés.
L’enquête révèle également que les mères de plus de la moitié des enfants de moins de cinq ans résidant en milieu rural ne sont allées à aucune consultation prénatale et que la moitié d’entre elles ont eu un accouchement sans assistance médicale.
La consultation prénatale joue cependant un rôle important dans la protection maternelle et infantile : 58 % des femmes en ont bénéficié et une femme sur trois a reçu au moins une dose de vaccin anti-tétanique.
D’après les résultats de l’E.D.S., la survie de l’enfant est directement liée à quatre facteurs qui sont : le milieu de résidence, le niveau d’instruction de la mère, l’espacement des naissances et l’âge de la mère à la naissance.
Pour ce qui est de la santé de l’enfant, l’enquête indique que 84% des enfants qui avaient un carnet de santé avaient été vaccinés contre les six maladies les plus graves de l’enfance à savoir la tuberculose, la diphtérie, la coqueluche, le tétanos, la poliomyélite et la rougeole. Par ailleurs, la diarrhée qui est très fréquente en Tunisie et qui constitue une cause principale de mortalité infantile a touché 21 % des enfants de moins de cinq ans au cours des deux semaines ayant précédé l’enquête, 65% de ces enfants ont reçu un traitement.
Les résultats fort intéressants de l’enquête E.D.S. devraient inciter les chercheurs à approfondir les données recueillies et à en élargir le champ de réflexion et d’analyse en vue d’une utilisation future optimale. Ils serviraient également de bons outils aux planificateurs et aux décideurs qui se verraient amenés à procéder à certaines améliorations dans le domaine de l’éducation et de la qualité de services en matière de santé.
L’O.N.F.P. aura, pour sa part, à poursuivre et intensifier ses efforts en matière d’I.E.C. (information, éducation et communication), à améliorer la qualité de ses services et à les rapprocher des citoyens, surtout en milieu rural, à chercher à intégrer le planning familial dans tous les centres de soins de santé de base, à encourager les pharmaciens et les médecins de libre pratique à soutenir et à promouvoir le programme national de Planning Familial et à introduire les services dans tous les milieux organisés et la médecine du travail. 

 

Kamel JILANI
Docteur en Science Politique


Kamel Jilani, “Enquête démographique et de santé en Tunisie : des points positifs et des efforts à déployer”, Correspondances n°17, Centre de Documentation Tunisie-Maghreb, mars 1990

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OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
IRMC (22 décembre 1990). Enquête démographique et de santé en Tunisie : des points positifs et des efforts à déployer. Le carnet de l'IRMC. Consulté le 11 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/qi8l


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